Tout petit, Aristide toisait les (autres) bébés d'un air désapprobateur, voire révulsé, et se préoccupait des plus grands, enfin de ceux qui savaient déjà bien parler. Au cours du printemps, pour des raisons évidentes, son attitude a évolué et il a commencé à s'intéresser à cette espèce étrange.
- Maman... Est-ce qu'ils parlent, les bébés ?
J'essayai en vain de lui expliquer que le langage est une acquisition lente et difficile :
- Mais non, c'est pas compliqué de parler ! (Evidemment, lorsqu'on bénéficie de l'entraînement intensif de mon moulin à paroles...)
- Et... est-ce que ça parle, un cheval ? Et une orange, est-ce que ça parle ?
Première conclusion : sur l'échelle de l'évolution, le bébé est à mi-chemin entre le cheval et l'orange.
Quelques semaines plus tard :
- Maman... est-ce que ça rigole, les bébés ?
Vous noterez le glissement du sujet : un être non doué de parole ne peut être désigné que par "ça".
Là encore, l'explication fut tellement difficile à admettre que la question fut posée plusieurs fois.
Et enfin :
- Maman... est-ce que ça mange, les bébés ?
Finalement, les bébés sont plus proches de l'orange que du cheval.... La réponse me valut des yeux exorbités : pas de chocolat ? A ce stade, mon petit garçon horrifié avait abandonné tout projet de redevenir un bébé : si cela implique de mener la vie austère d'un moine cistercien, évidemment...
Le coup fatal fut porté par un nourrisson de deux mois rencontré cette semaine. Aristide, encore plein d'espoir, décida de se montrer pédagogue et de lui faire découvrir les Beatles. Force fut de constater que son petit élève n'avait aucune intention de se pâmer devant les photos de Paul et John, et que pour une raison incompréhensible, il était insensible à l'histoire du sous-marin jaune. En revanche, la jeune maman, étant impressionnée par l'autonomie d'un grand de trois ans (gloups), fut dès lors l'objet de toutes les attentions de mon bébéologue. Et, depuis, celui-ci nourrit le projet de devenir "un grand de quatre ans", ce qu'il met en oeuvre activement. De mon côté, j'éprouve régulièrement une bouffée de gratitude envers mon lave-linge, mon aspirateur et mes lingettes... Comment ça, je suis mauvaise langue ?
PS : côté tricot, rien de nouveau pour l'instant, si ce n'est quelques achats très efficaces pour me remonter (temporairement ?) le moral. Mais on verra ça la prochaine fois.